Chapitre 2 | Une troupe, des salles

Aujourd’hui installé place Boieldieu dans le 2e arrondissement de Paris, l’Opéra-Comique n’a pas toujours été hébergé à cette adresse. Troupe foraine au XVIIIe siècle, Théâtre national depuis 2005 : l’histoire de cette institution fut tour à tour turbulente et prestigieuse. Retour en quelques dates sur les lieux qui ont accueilli l’Opéra-Comique depuis plus de trois siècles.

Par Savannah Guillon

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1714

D’origine populaire, l’opéra-comique naît dans les deux grandes foires parisiennes Saint-Laurent ( devant l’actuelle Gare de l’Est, chaque été ) et Saint-Germain ( entre l’actuel marché Saint-Germain et l’église Saint-Sulpice, chaque hiver). Commerces de luxe, artisans d’art et troupes ambulantes y attirent un large public. En 1714, la troupe foraine dirigée par Catherine Vondrebeck veuve Baron comprend un orchestre d’une douzaine de musiciens.

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Un théâtre de la Foire Saint-Laurent, Musée Carnavalet © Paris Musées 

1762

Alors que depuis une dizaine d’années, sous l’impulsion du directeur Jean Monnet, la troupe s’est consolidée et compte plus de vingt comédiens, une vingtaine de musiciens, une quinzaine de danseurs, l’Opéra-Comique doit fusionner avec la Comédie-Italienne. Il acquiert le statut de troupe royale et quitte la Foire pour l’Hôtel de Bourgogne. À partir de 1780, le répertoire d’opéra-comique ayant pris le dessus sur celui des Italiens, l’institution expulse les Italiens et retrouve le nom d’Opéra-Comique.

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L’Hôtel de Bourgogne, Bibliothèque-Musée de l’Opéra © BnF 

1783

L’Opéra-Comique s’installe dans la première Salle Favart, du nom d’un couple fameux formé d’une comédienne
( Justine Favart ) et d’un librettiste ( Charles-Simon Favart ). Conçue par l’architecte Jean-François Heurtier, sur un terrain offert par le duc de Choiseul, cette salle comporte environ 1100 places. Lors de l’inauguration sont jouées des œuvres de Grétry, en présence de la reine Marie-Antoinette. Le boulevard attenant est baptisé « des Italiens » en souvenir de la troupe licenciée.

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La première Salle Favart, par Angelo Garbizza, Musée Carnavalet © Paris Musées 

1801

L’Opéra-Comique absorbe le Théâtre Feydeau et s’y installe ( architectes Jacques Molinos et Jacques Legrand, 1800 places environ ). L’orchestre compte alors une quarantaine de musiciens et la troupe une vingtaine de chanteurs.

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Théâtre Feydeau © BNF

1829

L’Opéra-Comique quitte le Théâtre Feydeau, insalubre, pour la Salle Ventadour ( architectes Jean-Jacques Huvé et Louis Réguier de Guerchy, 1200 places environ ), édifiée à son intention et éclairée à l’huile et au gaz. On joue tous les soirs.

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Salle Ventadour, gravure de Gibée, Musée Carnavalet © Paris Musées 

1832

L’Opéra-Comique quitte Ventadour, trop coûteuse, pour le Théâtre des Nouveautés, place de la Bourse.

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Le Théâtre des Nouveautés, place de la Bourse, par Léon Leymonnerye, 1868, Musée Carnavalet © Paris Musées 

1840

L’Opéra-Comique investit la deuxième Salle Favart ( architecte Louis Charpentier, 1500 places environ ). Bâtie sur les ruines d’un incendie survenu en 1838 ( elle était alors occupée par le Théâtre-Italien ), elle est inaugurée avec
Le Pré-aux-clercs d’Hérold. 

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Trombinoscope de la troupe Favart en 1886 (personnel administratif et artistes), gravure de Louis Fortuné Méaulle, Musée Carnavalet © Paris Musées 

1887

Le 25 mai 1887, la Salle Favart brûle pendant une représentation, faisant plus de cent morts et de nombreux blessés. L’Opéra-Comique s’installe place du Châtelet ( actuel Théâtre de la Ville ). En 1893, l’État décide de rebâtir la salle de l’Opéra-Comique, à nouveau sur le même terrain.

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L’incendie de l’Opéra-Comique, gravure de Louis Fortuné Méaulle, Musée Carnavalet © Paris Musées 

1898

Inauguration de la troisième Salle Favart ( architecte Louis Bernier, 1500 places environ ) en présence du Président de la République Félix Faure. Il s’agit de la salle actuelle.

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Façade de l’Opéra-Comique, 1 place Boieldieu 75002 Paris

Suite à la faillite de 1936, l’Opéra-Comique est devenu en 1939 une succursale de l’Opéra de Paris au sein de la Réunion des Théâtres Lyriques Nationaux. En 1972, la troupe de chant est dissoute, et l’orchestre fusionne avec celui de l’Opéra. L’Opéra-Comique retrouve son autonomie en 1990, mais sans troupe ni orchestre. Théâtre national depuis 2005, il a fêté ses 300 ans d’existence en 2014-2015. Louis Langrée a été nommé directeur de l’Opéra-Comique à compter du 1er novembre 2022.

Résumé des trois chapitres

L’Opéra-Comique, c’est un théâtre original né dans les foires de Paris. Il mélange musique et théâtre parlé. Au fil du temps, il a changé de lieux, d’artistes et de formes, tout en gardant son esprit créatif. Les rues qui entourent le théâtre (Boulevard des Italiens, rue Favart, rue de Marivaux), rappellent cet héritage.