Disparition d'André Tubeuf

André Tubeuf (1930-2021)

Publié le 27 juillet 2021

DR André Tubeuf

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C’est devant l’écran de son ordinateur, Covid oblige et lui-même vacillant, qu’il a regardé et écouté les derniers spectacles de l’Opéra Comique. Ercole amante l’avait enthousiasmé, et prouvait qu’à près de quatre-vingt-dix ans son attention restait aiguë et son ouverture d’esprit entière, toute nostalgie remisée. Deux saisons plus tôt, il avait aussi aimé Hamlet et ses artistes d’aujourd’hui, autant qu’il avait aimé les grands anciens de la troupe, d’abord par le truchement du 78 tours (et d’une collection de photographies unique au monde) puis salle Favart même – il en a été le visiteur le plus constant et clairvoyant, soixante-dix ans durant. Si son goût profond le portait vers les voix du monde germanique, à Munich, à Vienne ou à Zurich, il a su voir et entendre tous ses chers chanteurs de Paris, de Janine Micheau à Sabine Devieilhe, de Michel Sénéchal à Philippe Talbot, avec l’œil perçant d’une oreille jamais lasse. Il a su les prendre par la main aussi, stimuler leur imagination vocale, leur ouvrir des horizons inouïs. Il y avait croisé ses idoles Elisabeth Grümmer et Hans Hotter du temps où ils enseignaient à l’Opéra Comique, il y avait soutenu Anna Caterina Antonacci, saison après saison, avec les égards d’un père, il y découvrait enfin tout ému Marianne Crebassa dans Fantasio et lui consacrait l’un de ses derniers portraits dans Le Point. André Tubeuf, l’écrivain mélomane, le maître de philosophie, l’homme de théâtre et de poésie, le cinéphile, en un mot l’humaniste, a traversé l’histoire moderne de notre théâtre en passeur insatiable de culture et d’émotion.

L’Opéra Comique reconnaissant