Patrick Davin (1962-2020)

Publié le 10 septembre 2020
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Patrick Davin

Générosité, enthousiasme, gaieté, érudition : tels sont, avec son délicieux sourire, les premiers traits de caractère qui nous viennent à l’esprit quand nous pensons à Patrick Davin, mort brutalement hier 9 septembre 2020 à Bruxelles, à 58 ans.

Patrick Davin était l’un de nos chefs d’orchestre préférés, un fidèle de nos saisons depuis dix ans. Nous l’aimions car il était un merveilleux passeur, un infatigable créateur de liens entre le répertoire, ancien, oublié ou confidentiel, et les artistes et mélomanes du XXIe siècle. Un passeur aussi entre la France et la Belgique sa patrie, et encore entre les exigences de l’écriture musicale et la liberté indispensable à l’épanouissement du spectacle vivant.

Épris de ce qui fait de la musique un langage des émotions – permettant aux œuvres de franchir frontières et générations – Patrick Davin avait dirigé à l’Opéra Comique La Muette de Portici d’Auber (2012), Le Roi d’Ys de Lalo (2013), Au monde de Philippe Boesmans (2015), Le Domino noir d’Auber (2018), et il s’apprêtait à assurer la reprise d’Hamlet d’Ambroise Thomas à Liège.

Il aimait citer Emmanuel Chabrier cherchant à définir le beau en musique : « De la variété, de la forme, de la vie par-dessus tout et de la naïveté si c’est possible, et c’est ça le plus dur ».

D’Auber qu’il avait défendu par deux fois, il tenait à restaurer la spontanéité des idées musicales, à raviver un charme qu’il savait oublié, ou décrié. Il puisait dans la connaissance approfondie qu’il avait du contexte de chaque œuvre – avec simplicité, sans jamais donner de leçon.

Face à quelque titre et quelque tradition interprétative que ce soit, il voulait d’abord renouer avec la personnalité du compositeur et le comprendre intimement, afin de le servir au mieux dans l’étape si importante de la préparation de la partition, puis lors des semaines de travail qu’il partageait avec les musiciens et les artistes du chant.

« Tout doit être délicieux, même l’inquiétude. » (en 2018)
« Un double objectif : valoriser la fraîcheur de la musique et favoriser le jeu scénique. » (en 2018)
« On n’est pas là pour briller, juste pour être vrais. » (en 2015)

Méticuleux, infiniment loyal à l’égard des partitions, Patrick Davin intégrait chaque production avec autant d’envie de partager son intelligence de la musique que d’épouser l’esprit du projet scénique. Car il avait à cœur de servir le spectacle, de magnifier les idées artistiques, de protéger la liberté que chacune et chacun doit éprouver, dans sa prestation, pour qu’ait lieu le partage avec le public.

Au moment de la représentation, tout reposait sur la lisibilité de son geste et la bienveillance de son regard. Mais il se régalait aussi à être le « premier spectateur ». Complice enthousiaste, il assumait ses énormes responsabilités avec modestie et sérénité. « C’est le paradis de les accompagner » disait-il en sortant de la fosse du Domino noir. Son bonheur et sa confiance étaient communicatifs.

Nous perdons avec Patrick Davin une baguette, une intelligence, un talent dans tous les répertoires musicaux qu’il a servis, historiques et contemporains, et plus encore : nous perdons de précieuses qualités humaines qui ont illuminé chacune des productions artistiques qu’il a dirigées, à l’Opéra Comique et chez nos partenaires de production. L’ensemble des équipes de l’Opéra Comique pense à lui avec une grande émotion et une immense tristesse.

Agnès Terrier

A la suite de La Muette de Portici, Le Roi d'Ys, Au Monde et Le Domino noir Salle Favart, Patrick devait diriger « notre » production d'Hamlet à Liège. Il venait par ailleurs d’être nommé directeur de la musique du Conservatoire de Liège. Un CD du compositeur Gabriel Dupont est récemment sorti et mérite d'être écouté.

Retrouvez son interview lors de sa direction musicale à l'Opéra Comique sur Le Domino Noir :

Zoom sur Patrick Davin / Le Domino Noir