J’avais envie qu’ils soient bien dans leur peau, bien dans leurs vêtements et bien dans leurs baskets
Thibault Vancraenenbroeck Créateur costume d’Archipel(s)
L’idée originale et inédite des costumes d’Archipel(s)
Thibault Vancraenenbroeck, créateur des décors et costumes du spectacle Archipel(s), nous a expliqué son processus de création des costumes auprès des jeunes de la Maitrise Populaire de l’Opéra-Comique
Il y a un an Adrien Borne, le librettiste, et James Bonas, le metteur en scène, ont travaillé auprès des Maitrisiens sous forme d’ateliers afin qu’ils soient au cœur de la création. La scénographie et les costumes sont nés de ces rencontres et de l’écriture du livret. Thibault Vancraenenbroeck explique que l’idée était d’écrire un opéra à partir d’eux « De leur vécu, de leurs préoccupations, tout en gardant un objectif d’écriture poétique et onirique », « un travail inspiré et inspirant au départ de leur vécu, leurs questionnements, leur quotidien ». C’est pourquoi il a inventé un protocole de création des costumes partagé afin de ne pas projeter sur les corps des jeunes une esthétique qui serait la sienne ou celle d’un autre adulte.
Cela a donné naissance à un « magasin » gratuit pour les jeunes de la Maitrise au sein de la salle Mado Robin de l’Opéra-Comique. Le stock de vêtements a été constitué à partir de réseaux de recyclage et récupération de vêtements plus ou moins anciens et d’achats de seconde main, ou neuf.
La Maîtrise Populaire de l'Opéra-Comique dans Archipel(s), 2024 © Stefan Brion
L’organisation du « magasin »
Les portants de ce « dressing collectif » étaient rangés par tailles et catégories mais non par genre. Un mélange des articles de vestiaire féminin et masculin était important pour Thibault : « volontairement, j’ai tout mélangé de façon à ce que les choix se fassent uniquement par affinités, par goût et non pas par classification de genre ».
Les Maitrisiens venaient deux par deux pendant une heure au « magasin » choisir leur tenue, tout en étant conseillé par le créateur costume sur la dramaturgie de chaque acte. Par exemple, pour l’acte II, plus sauvage et brut. Les jeunes ont été incités à s’amuser et à assembler des choses parfois audacieuses et décalées par rapport à leurs habitudes.
De plus, la garde-robe était complétée au fur et à mesure des essayages, afin que chaque Maitrisien puisse choisir sa tenue avec la même offre que les autres.
Les retours de l’expérience
Le choix des vêtements s’est déroulé en harmonie et avec beaucoup de joie pour les jeunes, sans qu’ils ne se préoccupent de l’époque ou de la marque à laquelle le vêtement appartenait. Par exemple des jeunes entre 15 et 20 ans ont choisi des chemises des années 1920-30. Enfin, selon Thibault Vancraenenbroeck, la Maitrise Populaire représente « un petit bout d’humanité » d’une grande richesse, car « c’est une population avec une mixité plus grande que dans d’autres ensembles ».
En ce qui concerne les ateliers costumes de l’Opéra-Comique, l’expérience était nouvelle car « il a fallu déplacer la pratique habituelle ». Le créateur costume d’Archipel(s) ne souhaitait pas fabriquer du « beau costume » au sens traditionnel du terme mais travailler sur l’accompagnement et la rencontre de chaque Maitrisien : « J’avais un désir de rencontre de ces individus et peut-être aussi une forme de pudeur de ma part à ne pas vouloir projeter sur eux une image d’eux que j’aurais moi fabriquée dans mon coin ».
Ainsi, les ateliers costumes et Thibault Vancraenenbroeck se sont pris au jeu et ont beaucoup apprécié partager cette nouvelle expérience ensemble.
